En cette semaine de février, le constat météorologique est plein d'amertume pour quiconque aime les sports de montagne. Beau temps la semaine, mais un temps pourri s'annonce pour le weekend. Devant cette absurdité de la nature, une seule solution s'impose alors : le RTT pirate !
Le principe est simple. Tout d'abord, il faut avoir la chance de travailller pour une entreprise qui permet de poser un jour de congé à l'improviste en milieu de semaine, un jour de réduction du temps de travail, le fameux ! Ensuite, il faut choisir une belle journée ensoleillée, et si possible un lendemain de chute de neige si votre sport implique de sortir des spatules quelconques. Enfin, prévoir une belle course pour profiter scandaleusement au mieux du plaisir d'aller cotoyer un sommet. Et voila, la recette du RTT pirate.

L'hiver étant bien avancé, il est également temps d'aller faire flamber toutes ces lipides ingurgitées à grands coups de raclettes et de saucisson. Le programme de la journée n'est pas encore clairement fixé, mais cela doit normalement se passer dans la partie Nord de Belledonne, du côté du vallon de Gleyzin, près du refuge de l'Oule. Il y a là-bas de belles cascades de glace à grimper, mais nous hésitons également avec la goulotte Grasse Matinée au Pic des Grandes Lanches. Mais un coup de fil innattendu de mon partenaire Grenoblois, dont la voiture vient de tomber en rade, change le programme. C'est donc parti pour Grenoble, où je retrouve Vincent qui me propose d'aller sauver la journée en aller visiter une goulotte aux arêtes du Gerbier, dans le Vercors. J'apprends au passage un nouvel adjectif: "vertacomicorien". On l'utilise pour désigner tout ce qui a attrait au Vercors. Je redescendrai donc moins bête de la-haut.

Le Gerbier est un sommet de la grande barrière Est du Vercors, au dessus de Villard de Lans. La traversée des arêtes est une grande classique du massif, surtout en été. Le sommet offre aussi quelques goulottes faciles. Nous partons pour la goulotte des Marmottes, sur sa face Ouest.

L'approche de la voie se fait depuis le haut du domaine skiable de Villard de Lans. Nous prenons donc la décision fainéante, mais néanmoins hautement stratégique, de monter en télécabine avec un forfait piéton. En quittant les pistes, au dessus d'une mer de nuages qui semble bloquée à 1500m dans toute la région, le choix nous apparait hélas beaucoup moins stratégique. Nous commençons à brasser dans la poudreuse dans le vallon au pied de la grande pente des arêtes. Punaise, ils sont où nos skis !? La pente qui mène vers la voie est en poudreuse également. D'ailleurs, équipés de nos DVA, nous prenons nos distances. Nous apercevons aussi une cordée au-dessus de nous. Eux sont en raquette.

Nous remontons un petit couloir jusqu'à trouver un bon emplacement pour un premier relais, sur une belle lunule dans le rocher.

La voie rejoint ensuite le sommet en trois grandes longueurs jusqu'au sommet des arêtes. On trouve quelques bons emplacements de relais sur friends. Nous croisons un piton pendant l'ascension, le topo en mentionne plusieurs.

Les conditions de la goulotte ne sont pas très bonnes, nous brassons beaucoup dans la neige, mais quelques passages en neige dure, glace fine, ou rocher viennent varier les plaisirs. Un pas difficile de mixte se démarque particulièrement, mais il se protège bien grâce à une lunule trouvée en creusant sous la neige.

La sortie de la voie se fait au niveau d'une brêche offrant une vue sur le versant Est et sur la vallée de Grenoble. Toute la vallée se trouve toujours sous la vaste mer de nuages.

Nous prenons ensuite pied sur le sommet des arêtes, et un décor magique s'offre à nous. La sensation de respirer le ciel m'envahit.

 Nous décidons de redescendre en parcourant les arêtes vers le Nord. Nous ignorons quelle sera la longueur de la traversée, mais cela devrait être court car la cordée qui nous précédait est déja descendue.

La traversée n'est pas débonnaire, il faut rester sur le fil sans approcher trop près le bord corniché par endroits. Quelques passages nécessitent de se mettre à califourchon, voire de sauter depuis un gendarme de quelques mètres pour atterrir dans la neige.

 Nous trouvons finalement un bon itinéraire de descente, en tirant un rappel sur un bequet au niveau d'une belle brêche. Nous pouvons alors prendre pied sur une grande pente de neige nous ramenant tranquillement au pied de la face Ouest.

 La neige est bonne dans la pente douce qui nous ramène dans le vallon. Mon royaume pour des skis !

 Nous quittons maintenant la haute montagne et tournons le dos à ces faces roses de la lumière du soir. Avant un retour nocturne vers Villard.

Merci à Vincent pour sa patate et sa joie de grimper.

Gerbier, Goulotte des Marmottes. AD+/2/M4

 http://www.camptocamp.org/outings/601925/fr/gerbier-goulotte-des-marmottes