Les encadrants recadrés par la Nonne

Le 09.07.2018, par JulienB, 5 commentaires


Amis lecteurs, amateur de bonnes choses, voici LA recette d’un week-end réussi.

Prenez tout d’abord quelques encadrants de la commission alpi élevés en plein air. Ajoutez-y quelques co-encadrants bien frais. Laissez chauffer doucement mais sûrement sous un soleil radieux. Quand ils sont tous bien à point et que la crème solaire mêlée à la poussière forme un nappage onctueux, agitez-les avec des révisions techniques puis retirez une nuit dans une couverture en laine qui gratte bien. Couvrir avec un couvercle. Ensuite, jetez les encore froids dans une petite course d’application de votre choix. Laissez mijoter quelques heures puis servez sans attendre, sans quoi vous pourriez rater le dernier train du Montenvers.

Naturellement, une alchimie ne résume pas à une suite d’ingrédients ajoutés simplement les uns aux autres. Il faut pour cela la main subtile d’un chef qui saura faire jouer sa maitrise pour affiner les dosages afin que les saveurs salées sucrées restent en bouche et enrichissent l’expérience de chacun.

Lors de ce premier week-end de juillet, grâce à l’initiative de Benoit, tous les agréments cités ci-dessus étaient réunis autour de Florian, promu grande toque étoilée pour l’occasion. Le cadre exceptionnel de la mer de glace et du bassin du Talèfre offraient un panorama grandiose.



En guise de hors d’œuvre, une petite révision des techniques de cramponnage s’imposait pour nous mettre l’eau à la bouche. Il était déjà 10h10 passées quand nous nous lancions dans des traversées, montées et descentes appliquées. Une petite dépression offrait non loin de là une pente suffisante pour s’exercer ensuite au maniement du piolet. Qu’il soit canne ou ramasse, il y en avait pour tous les goûts. J’appris à cette occasion que le tenir la lame en avant relevait de la technique française. Sans surprise, les anglais quant à eux procèdent à l’inverse. L’alpiniste averti saura astucieusement tirer parti de la première à la montée et de la seconde à la descente.





Le temps de digérer ses « révisions » bien utiles à la plupart d’entre nous, et nous voilà prêts à monter les blancs en neige. Il faudra tout de même attendre d’arriver juste sous le couvercle pour trouver enfin cette dernière. La montée par les échelles offre un cheminement varié et une vue imprenable sur de nombreux sommets, dont notre objectif du lendemain : la Nonne !



A peine arrivés, il nous faut déjà préparer le prochain service. Chacun trie ses affaires, refait son sac, recharge en eau et épluche le topo. Un petit conciliabule fixe le réveil à 4h mais reste indécis quant à savoir si on doit mettre le cap à l’est du nord…

Grâce à la nuit des refuges, nous pouvons visionner un film aussi simple et sincère dans sa narration qu’extraordinaire dans l’aventure qu’il relate. A voir : http://antoinemoineville.com/riso-patron-hasta-las-webas/

Les quelques heures de sommeil péniblement gagnées suffiront bien. Il est temps de se bouger les miches. Je passe la tête dehors pour prendre la température. La pleine lune baigne la face nord des grandes Jorasses d’une lumière fantastique. L’ambiance est incroyable.



L’affluence exceptionnelle ou le manque d’organisation ou les deux à la fois mettent les gardiens dans le jus ! Le petit déjeuner, limité dans un premier temps à une tartine par personne, arrive avec 20 bonnes minutes de retard. Ça fait partie des aléas, on s’adapte. François, en montagnard expérimenté, sait que la nuit qu’il vient de passer ne lui permettra pas de faire la course dans des conditions adéquates. Il prend donc la décision responsable et altruiste de nous attendre au refuge.

La remontée du névé au-dessus du refuge nous permet de prendre rapidement pied sur le glacier du Moine. On rallonge la corde avant de continuer en direction de notre objectif qui se dévoile petit à petit. Un bref arrêt, nous permet de voir les subtilités de l’encordement selon la méthode utilisée et de faire un rappel sur les techniques de mouflage.



La dernière pente est vite avalée et nous prenons pied sur une large terrasse au pied de la voie. Changement d’ambiance, nous laissons les broches et crampons dans une fissure et nous décorons nos baudriers avec une brochette de friends, coinceurs et dégaines. Le premier petit ressaut est vite franchi. Nous tirons des petites longueurs ou évoluons cordes tendues en fonction du terrain. Le PD+ du Vallot s’avère plus vertical ce que nous avions imaginé. Le rocher est globalement bon et se protège de mieux en mieux au fur et à mesure de l’ascension.



 

La difficulté réside davantage dans la gestion des 4 cordées simultanées, la nécessité de rester groupés et de respecter les consignes convenues avec Florian. On s’emmêle bien vite, on oublie de s’attendre et on s’étire au point de se perdre de vue. Deux cordées à droite et deux cordées à gauche. La recherche du bon itinéraire était, comme nous avait prévenu Florian, un des enjeux de cette course.



Il nous faudra une bonne demi-heure pour arriver à nous retrouver. Bien qu’il ne soit, à ce moment-là, que 9h30, les carottes sont cuites. Nous venons d’atteindre l’heure limite que nous nous étions fixés la veille afin d’assurer la compatibilité entre notre horaire et celui du Montenvers. Ce parcours essentiellement fréquenté à la montée par les cordées qui enchainent sur l’Evêque n’est pas très emprunté à la descente. A nous donc d’improviser notre descente. La recherche de becquets appropriés commence



Un bout de cordelette rapidement nouée, une minute de réflexion sur la meilleure stratégie au niveau de l’agencement des cordes et on se laisse glisser un à un vers le bas. A neuf ça prend du temps. La fatigue de la veille, ajoutée aux quelques heures d’efforts déjà passées, émoussent la vigilance. Heureusement, le regard bienveillant des uns permet de rattraper les approximations des autres et on voit que même un mauvais geste en apparence anodin pourrait vite avoir des conséquences potentiellement dramatiques. On reprend pied sur le glacier et on se laisser glisser vers le refuge où on retrouve François requinqué par une matinée en compagnie des gardiennes.

La descente par les Egralets nous permet d’atteindre rapidement la moraine puis la mer de glace où un petit catabatique des plus agréables nous accompagne jusqu’aux échelles. L’horaire finalement précoce nous permet d’éviter l’affluence des derniers trains et précipite notre installation à la terrasse du bar le plus proche de la gare où les plus gourmands choisiront de magnifiques coupes glacées au nom de sommets évocateurs.



Arrive l’heure de la séparation, chacun rentre chez soi. Pourtant, je ne pense pas me tromper en affirmant que plusieurs sinon tous, partagent un sentiment un peu aigre doux que laisse la satisfaction du but atteint (qui, en l’occurrence n’était pas le sommet) diminuée de l’impression qu’on aurait pu faire mieux. Certes nous avons passé un week-end fabuleux dans un cadre exceptionnel. Certes nous avons approché ou redécouvert des sommets mythiques et les aventures souvent extraordinaires qui ont jalonné leurs ascensions respectives. Certes nous avons pu ajuster, apprendre et comprendre beaucoup au contact de Florian dont le calme, la simplicité et la pédagogie convenaient parfaitement aux buts recherchés. Certes nous avons pu favoriser une meilleure cohésion au sein de cette commission alpi qui comprend pas mal de membres qui n’ont pas toujours l’occasion de se croiser et d’apprendre à se connaître. Quelle chance !

Pourtant l’enseignement ne serait pas complet sans procéder à la nécessaire remise en question qui s’impose pour notre pratique personnelle et à plus forte raison pour une fonction d’encadrement. Nous réalisons à quel point l’apprentissage s’apparente au tonneau des danaïdes qu’il faut alimenter sans relâche et sans espoir d’y voir un jour la fin. Cet apprentissage ne concerne pas uniquement la technique mais relève également en grande partie de la connaissance de soi et de comment la difficulté au sens large influence le facteur humain : perte de moyen, énervement, lucidité, etc. Il est intéressant également d’apprendre à observer cette évolution chez les autres et savoir s’adapter et agir au mieux afin d’assurer sécurité et bonne ambiance, mutuellement dépendantes l’une de l’autre.

Gérer le groupe, savoir s’adapter au rythme du plus lent et accepter de ralentir, se surveiller les uns les autres pour prévenir l’erreur qui guette chacun d’entre nous, ne sont que quelques-uns des éléments indispensables à une pratique orientée plaisir et autonomie qui à mon sens doit être proposée aux participants des sorties CAF.

Toutes ces pistes, dont la liste ne saurait être ici exhaustive, ne seraient pas possibles sans un préalable essentiel : la marge !

Pour conclure, loin de la métaphore culinaire entreprise au début de ce récit, je souhaiterais très simplement et néanmoins sincèrement saluer l’initiative de Benoit et remercier le CAF d’avoir rendu cette escapade possible. Cette sortie symbolise à mes yeux l’essence du CAF qui permet de promouvoir partage et autonomie vers la montagne. Merci enfin à tous les participants que j’ai rencontré ou appris à mieux connaître et avec qui j’espère partager d’autres aventures.

Je n’ai qu’une seule hâte désormais : continuer à sortir pour mettre en application et participer à la saison 2 prévue début aout !

 

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